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mardi 30 juillet 2013

Interview avec son altesse ,le Sultan de Zinder Elhadji Aboubacar Sanda

le Sultan de Zinder Aboubacar Sanda


Le Damagaram : Votre altesse, pouvez-vous nous faire un bref historique du sultanat du Damagaram ?

Son Altesse Alhadji Aboubacar Sanda : Pour l’histoire, deux chasseurs de la région de Kellé arrivèrent dans le pays qui s’appellera plus tard Damagaram. Un jour, chacun partit chasser de son côté. Après un long temps, Karda, l’un des deux chasseurs retrouva son compagnon dans une clairière. Il lui demanda : « da ba grimi ? ». Ce qui veut dire en kanouri : « c’est de la viande crue que tu manges ? » Les Hausa par la suite déformèrent cette phrase en Damagaram. Quant à Zinder qui vient de Zundurma, il fut tout aussi créé par un chasseur à quelques 80 kilomètres du Damagaram.
Maintenant pour parler du Damagaram, nous retiendrons que sa date de création remonte à 1736. Il eut pour illustre fondateur Mallam Yunus, un éminent marabout venu du Bornou pour prêcher le saint Coran. Celui-ci parvint à se valoir la sympathie des populations par les nombreux miracles qu’il fit, à tel point que ces dernières, qui lui confièrent l’enseignement de leurs enfants, lui donnèrent également leurs filles en mariage. Mais l’attaque perpétrée en ces temps là par les pillards touaregs descendus du nord, l’obligea à se déplacer. En passant par Kolon Fardou, Damagaram Takkaya, il alla s’installer à Guéza. Après sa mort, ses fils, puis ses petits fils dispersés dans les villages environnants comme Kirshiya, Ci Hanza prirent la relève. Ceux-ci tout en continuant son œuvre, devinrent des chefs. C’est ainsi que parmi sa lignée, Saleeman, fils de Tintouma ki Garagé, fut le tout premier sultan à prendre le nom de Sarkin Damagaram ou sultan du Damagaram. Ce fut également lui qui, en venant s’installer à Zinder, en fit la capitale de la cité-Etat du Damagaram. Parmi les grands sultans, on citera aussi le sultan Tanimoun, qu’on appelle le bâtisseur, qui fit construire le garu, ou rempart, en 1856. Ce grand stratège dans l’art de la guerre affranchit le Damagaram de la tutelle du Bornou, fit de l’armée du Damagaram une véritable armée de métier. Il développa l’industrie comme la teinturerie, la tannerie, etc. Il fit de Zinder la porte du soudan en encourageant le commerce transsaharien. Ce fut lui qui étendit les frontières définitives de la cité-Etat du Damagaram.
Zinder possède de nombreux sites et monuments historiques qui, pour peu qu’ils soient mis en valeur, prêteraient au tourisme. Quel appel lancez-vous aux partenaires pour vous aider à réhabiliter de tels sites et monuments ?
Zinder possède en effet de nombreux sites dont le ranch des autruches, la colline aux deux sources de Ganatcha. Dans le Termit, on découvre des animaux spécifiques tels les addax, les outardes, les autruches etc. Concernant les monuments, on trouve, entre autres, celui de Henri Barth dans la vieille cité de Birni. À Djajidouna, on trouve la première prison construite par les colons. Pour peu que ces sites et monuments soient mis en valeur, notre région va développer une véritable industrie touristique. L’appel que nous avons à lancer va d’abord à l’endroit de nos agences touristiques. Aujourd’hui nous sommes dans un monde de l’information et de la communication. On ne peut pas développer un secteur aussi important que le tourisme qui, ailleurs, génère de fortes rentrées en devises, sans au préalable faire connaître à l’extérieur ce que nous avons comme ressources particulières. Il faut que les agences vendent notre image. Qu’elles fassent connaître nos richesses. Aujourd’hui, les touristes regardent sur internet pour choisir les destinations de leurs voyages d’agrément. Nous encourageons en ce sens nos agences à se faire de la visibilité. Ensuite, comme aujourd’hui on ne peut rien entreprendre sans moyens, nous lançons un appel solennel à l’Unesco et aux autres institutions et partenaires au développement pour venir voir, composer avec nos opérateurs, pour qu’ensemble nous puissions mettre en valeur ces sites. Cela va être un gain pour tous.
La jeunesse constitue le fer de lance de tout développement. Parlez-nous de celle du Damagaram.
La jeunesse constitue, vous l’avez si bien dit, le fer de lance de tout développement et cela que ce soit ici à Zinder ou partout au Niger. Ce qu’il faut relever ici est que notre jeunesse est confrontée d’abord à un problème de désœuvrement. Ensuite, force est de constater qu’elle est sujette à un manque de suivi de la part des parents. Et cela est préjudiciable à son éducation, à son instruction, à sa santé, bref à son bien être. Nous croyons bien qu’il nous faut remédier à ce laisser-aller et à cette démission qui sont en train de prendre le pas sur les responsabilités que nous avons. « Nos meilleures graines, disait Cheick Hamidou Kane, ce sont nos enfants ». Nous devons pour ce faire assumer les responsabilités qui sont les nôtres en donnant une bonne éducation de base à nos enfants. À l’endroit de ces jeunes qui attendent beaucoup de la vie et de nous qui sommes leurs parents, nous demanderons d’être indulgents. De chercher un métier quel qu’il soit. Les jeunes ne doivent pas dédaigner les métiers qui sont souvent à leur portée car, comme le dit l’adage, « il n’y a pas de sot métier, il n’y a que des sottes gens ». Et nous rappellerons cet autre proverbe de chez nous qui dit « da babu gonda ba dadi « mieux vaut ce n’est pas bon à il n’y en n’a pas ». On doit se contenter et prendre patience du peu qu’on a. Tout ne se construit pas en un seul jour. Nous disons ceci à notre jeunesse. « Sachez que nous sommes là pour vous aider. Nous sommes attentifs à vos préoccupations. Vos problèmes sont les nôtres. Nous ne sommes pas vos adversaires mais vos parents, vos conseillers. Et on n’a jamais vu aucun parent qui désire du mal pour son enfant. Nous sommes avec vous, notre jeunesse, dans le cadre d’une société qui cultive la paix, et la tolérance. Parce que sans paix, sans quiétude sociale, et sans tolérance, rien ne peut se construire de durable. À cet effet, nous devons éviter de nous porter préjudice à nous même en nous faisant violence. Si nous arrangeons les choses, ce seront nos choses à nous que nous aurons arrangées. Et si nous gâtons les choses, ce seront nos choses à nous que nous aurons gâtées. Et dans le cas où, au lieu d’arranger, nous gâtons nos choses, hé bien, c’est encore à nous que revient le devoir de réparer les choses que nous avons-nous-même gâtées.
On constate qu’il est de plus en plus fréquent qu’on recourt à la mise du saint Coran pour réguler la vie sociale ou pour régler les différends à Zinder. Quel commentaire un tel recours au livre saint vous suscite-t-il ?
Le problème qui se pose dans le cas que vous citez là, ce n’est même pas au niveau du sultan ou du sultanat, ou des notables qu’il se pose. Le problème se situe au niveau de la population elle-même. Aujourd’hui pour un rien, les gens veulent qu’on leur donne l’autorisation de mettre le coran. Et si on le leur empêche, ils interprètent ce refus d’une autre manière. Concernant cette question, ce que nous avons à faire, en ce moment, c’est de continuer à sensibiliser les gens avec des prêches et autres pour qu’ils comprennent qu’on ne blague pas avec le saint Coran. C’est un livre saint qui est la parole de notre Dieu et qu’il nous faut respecter et protéger. Les citoyens n’ont qu’à prendre exemple sur les autres régions. Quand il y a un conflit là bas, les gens cherchent à régler le différend à l’amiable et jamais on ne met le saint Coran.
Avec la décentralisation, les entités administratives sont appelées à prendre en charge, pour une grande part, leur propre développement. Quelles démarches le sultanat de Zinder a-t-il entreprises pour faire bénéficier de son influence à la région en attirant des investisseurs étrangers ?
Avant de parler des investisseurs étrangers, je parlerai d’abord de nos opérateurs économiques locaux. Je les invite à investir dans tous les domaines, surtout dans la création d’unités industrielles qui vont permettre une création d’emplois dans notre région. Il faut qu’ils viennent en aide aux jeunes comme ailleurs on le voit faire. Pour ce qui est du recours aux investisseurs étrangers, il y a des filières qu’on doit suivre et il y a les projets à concevoir, à ficeler et à soumettre. Nous avons souvent des délégations étrangères qui viennent nous rendre visite. Dans la plupart des cas nous n’avons pas de proposition concrète à leur faire. Or ce n’est pas à l’autre de concevoir à votre place ce que vous voulez lui proposer. Nous croyons que nos associations de développement et autres doivent s’employer à concevoir des projets qu’elles pourront soumettre à nos partenaires. Nous sommes pour notre part tout à fait disposés à les aider pour que ces projets aboutissent. Nous les encourageons en ce sens à multiplier les initiatives. Concernant les services qui s’occupent de réceptionner les projets soumis par les ONG et associations de développement, nous les exhortons à plus de diligence dans les traitements, surtout à éviter les lenteurs administratives qui portent préjudice à nos projets. En matière de développement on n’attend pas.
Quel appel avez-vous à lancer aux Damagarawas ?
Notre appel est surtout que les gens comprennent que le monde a beaucoup changé. Aujourd’hui en prenant l’exemple du Niger, il y 8 régions. Dans toutes ces 8 régions, les gens cherchent à se développer. Chacune de ces 8 régions cherche à être la meilleure parmi les autres. C’est comme une compétition. À cet effet, il faut que tout le monde apporte sa modeste mais indispensable contribution pour que nous puissions développer notre région. Il faut aussi que ceux que Dieu a favorisés en biens, essaient de créer des emplois pour les jeunes. Il faut que ceux qui ont été élevés à des postes de responsabilité pensent à trouver du métier et de l’emploi pour nos jeunes. Nous lançons un appel à tous les Damagarawas afin qu’ils soient soudés et solidaires. C’est ensemble, dans la paix, dans le respect mutuel, dans le respect des valeurs républicaines, que nous allons réussir à asseoir les bases de notre vrai développement.
Notre dernier appel va à l’endroit de l’ensemble de la population. Chaque jeudi et vendredi nous nous rendons sur la place de la grande prière pour invoquer Dieu afin qu’il nous comble de ses faveurs et gratifie notre pays d’un hivernage fécond. Nous en appelons à tous sans distinction à venir apporter leur contribution, soit en venant prier avec nous notre Seigneur, soit en mettant à disposition de nos illustres marabouts qui sacrifient leur sommeil et leur temps pour implorer pour toute la Oumma la bénédiction divine un peu des biens que Dieu les a gratifiés. Nous sommes sûr qu’avec une telle disposition, nous allons gagner cette lutte pour un développement harmonieux du Damagaram et du Niger dans son ensemble.
Avez-vous un dernier mot ?
Notre dernier mot est un souhait. Depuis quelque temps nous avons la SORAZ qui est une grande unité industrielle qui s’est implantée dans notre région. Nous pensons, comme l’a eu à maintes reprises, répété l’opinion, que la SORAZ, en concert avec le gouvernement, doit essayer de revoir sa politique en matière de prix. Ceci afin de faciliter l’accès aux produits pétroliers aux populations, ce qui, d’une part va permettre une consommation accrue des produits, mais aussi une rentrée de devises significative pour elle. Elle doit tout aussi promouvoir une politique de création d’emplois pour nos jeunes. Les populations riveraines, en toute logique, doivent être prioritaires. Pour cela nous espérons que cette doléance sera prise en compte pour une meilleure réussite et une bonne intégration de la société dans le paysage social du Damagaram.
Nous n’oublierons pas à la fin de remercier les jeunes qui sont en ce moment en train de faire la sensibilisation dans les différents quartiers pour que la paix et la quiétude sociale règnent dans le Damagaram. Que Dieu le Très Miséricordieux nous gratifie de Sa Grâce. Qu’il rendre prospère notre région et élève notre pays. Amen !
 Interview réalisée par B. Marka et I. DIALLO.