Elsa II Jacqueline Nyate Tambou, âgée de 24 ans a subi
les assauts de son géniteur pendant une décennie. Elle assure que ses trois sœurs
ont subi la même chose. L’affaire est au tribunal…
Que se passe-t-il quand un matin, au
léver du soleil, votre sœur, votre amie, votre confidente, vous dit ce qu’elle
a subi pendant dix ans, une histoire que son merveilleux sourire dissimulait.
Que dites vous à votre fille qui vous souffle à l’oreille sa vie durant une décennie.
Et que vous entendez: « j’ai été violée pendant dix ans ». Pire,
« par mon père ». Que répondez-vous? Je n’ose imaginer la réponse.
« A force de coucher avec mon père, j’ai pris
goût »
Que dites vous, lorsqu’au cours d’une
audience au tribunal, elle lance: « à force de coucher avec mon père, j’ai
pris goût ». Et un silence envahit la salle du tribunal de première
instance de Bonanjo, à Douala au Cameroun. Papa, Roger Claude Tambou, 54 ans,
est assis à un mètre d’elle, sur le banc des accusés. Personne n’ose
bouger, de peur de dévoiler sa peine. De peur de lire dans le regard du voisin,
une histoire similaire. C’est pourtant ce qu’Elsa II Jacqueline Tambou, 24 ans,
a vécu. La jeune fille a subi pendant 10 ans, les assauts de celui qu’elle
continue d’appeler « papa ». « Je dormais dans la même chambre
que lui. Papa a commencé cela un soir », se souvient la jeune fille.
En effet, Elsa a 13 ans à l’époque.
Elle vient de quitter le village de sa mère, Ebolowa, pour Douala, ville où vit
son père. La petite fille est toute joyeuse à l’idée d’aller à l’école et de
vivre enfin avec ce « papa » qu’elle a tant cherché. Ses camarades à
Ebolowa avaient un père, pas elle. Elsa est loin de se douter qu’elle entre
ainsi dans la gueule du lion. Dès son arrivée, elle dort dans la même chambre
que papa. Des soirs, il la caresse. « Normal. C’est mon papa »,
pense-t-elle. Puis, un soir, elle ressent une douleur entre les jambes. Elle se
réveille en sursaut. Papa est sur elle. Elle tente de crier. Le lui empêche de
sa main. Et les autres soirs, le même calvaire continue. Papa vit avec ses sœurs
et frères, sans aucune femme.
« Je suis tombée enceinte une fois, papa m’a
conduite chez une femme «
Elsa n’est pas libre. Son père ne la
lâche pas. Chaque fois qu’elle sort, à son retour, il contrôle son slip. Il
hume pour détecter l’odeur du sperme. Si c’est le cas, la jeune fille est
bastonnée. Roger Tambou veut sa fille pour lui tout seul. Elle devient son
objet sexuel et les conséquences ne tardent pas à suivre. La jeune fille
tombe enceinte. Son père prend peur. « Il m’a conduite chez une femme à
Bependa (quartier difficile de Douala). Elle m’a donné un médicament qui m’a
fait très mal au ventre. Et beaucoup de sang a coulé », se souvient-elle. Après
l’incident, son père l’oblige à prendre des comprimés chaque fois après l’acte
sexuel. Des pilules du lendemain. Les mots qui ont fait découvrir le pot aux
roses.
« Je ne crains pas que ma fille soit enceinte,
elle prend des pilules de lendemain »
En effet, un week-end du mois d’avril
2012, Elsa décide d’aller à Kribi, ville balnéaire camerounaise, avec des
amies. Elle ne met pas son géniteur au courant. Fou d’inquiétude, son père
se met à sa recherche. Il vient chez sa matrone, propriétaire d’un
restaurant au quartier Bali à Douala. Il se met à l’expliquer qu’il n’a pas
peur que sa fille tombe enceinte. Comment ? S’étonne-t-elle. Il lui dit
qu’Elsa « prend les pilules du lendemain ». Ce qu’un père n’est pas
sensé connaître. La matrone à la puce à l’oreille. De retour de son voyage,
elle pose des questions à son employée. Elle veut comprendre. Elsa visiblement
à bout se confie. Et le 25 avril 2012, une plainte est déposée au
Commissariat de sécurité publique du 8ème arrondissement
contre Grégoire Tambou. Il est ensuite mis sous mandat de dépôt à la prison
centrale de New-Bell à Douala. «Enfin, justice a été faite», se réjouissent de
nombreuses personnes. Elsa, elle, sait que tout ne sera jamais facile pour
elle.
Le père incestueux épilait ses filles
Elle doit lutter pour elle et pour
ses sœurs. Elle assure que ses trois petites sœurs ont été violées. « Il
dort dans la même chambre que ma sœur (Yasmine Tambou, 15 ans). Je suppose
qu’il l’a fait la même chose que moi », pense Elsa. Yasmine a d’ailleurs
reconnu au cours d’une audience, que son père « les épilait
souvent », ses sœurs et elle. L’affaire a été renvoyée au tribunal de
Grande instance du Wouri. Le tribunal de première instance s’est montré
incompétente. Que tranchera la fin? Elsa veut une seule chose, qu’on sauve ses sœurs.
Même si son père est en détention provisoire actuellement, elle veut que
justice soit faite. Il encourt jusqu’à 25 ans de prison. La salle d’audience
est toujours pleine. Le Cameroun attend la fin de cette histoire d’inceste qui défraie
la chronique. Le cas d’Elsa permettra peut-être aux autres filles qui vivent le
même calvaire de sortir de l’ombre et de croire à la justice…
Lumière du Cameroun